3.6. La forme écrite des mots

La forme écrite des mots fournie une assez bonne indication sur la segmentation des énoncés en mots. Mais comme pour le rapport entre l’écriture et la prononciation, il convient de prendre garde cependant à une certaine part d’arbitraire dans la langue écrite. Pour s’en rendre compte il suffit de considérer comment sont réalisés à l’écrit les mots composés - on a déjà vu quelques exemples en 3.3. Les mots composés. Ce qui vaut pour l’analyse phonologique, vaut pour l’analyse morphologique ; de même que la forme écrite reflète plus ou moins bien la prononciation des mots, la forme écrite des mots n’est pas toujours en accord avec l’analyse morphologique. L’adéquation est cependant bien meilleure.

Un exemple particulièrement intéressant pour illustrer le fait que l’écriture peut néanmoins être un bon indicateur pour l’analyse morphologique est la différence écrite entre les verbes s’enfuir et s’en aller. Si on laisse de côté le pronom réfléchi, le premier verbe s’écrit en un seul mot alors que le second s’écrit en deux mots. Ce qui est en jeu ici c’est précisément le critère de la séparabilité. S’en aller s’écrit en deux mots bien qu’il soit comparable à s’enfuir sur le plan de la signification (aspect inchoatif des verbes aller et fuir), parce qu’il existe une construction où il est encore d’usage d’insérer un mot entre en et aller. On a ainsi dans la langue deux formes concurrentes dont l’une appartient à la langue soutenue alors que la seconde est fréquemment réalisée à l’oral :

a. Il s’en est allé de bonne heure.
b. Il s’est en allé de bonne heure.